C’est au xixe siècle, lors des guerres colonisatrices en Égypte et en Inde, que les qualités thérapeutiques du chanvre psychotrope, connues de toute antiquité, sont redécouvertes par l’Occident. Prescrit sous forme d’une « teinture » dont on absorbe quelques gouttes, le chanvre « indien » — comme on dit alors — fait figure de remède universel. Il est utilisé contre la douleur, les spasmes, l’insomnie, le manque d’appétit, aussi bien que pour faciliter les accouchements difficiles ou pour le sevrage des alcooliques ou des morphinomanes.
Cependant, différents lots de chanvre contiennent des quantités variables de principes actifs, et l’on ne sait pas remédier à ces écarts, car le THC, son principe actif le plus important, n’est identifié qu’en 1964. L’utilisation médicale du chanvre tombe donc en désuétude. Il disparaît des pharmacopées officielles dans les années 1950 ; ayant perdu le statut de médicament, il ne peut plus être prescrit.
Passent les années. Partie des États-Unis, la prohibition du chanvre s’étend au monde entier. Personne ne se souvient plus que le « cannabis » (tel qu’on le nomme désormais) ait été largement utilisé par la médecine.
Dans les années 1960, la jeunesse américaine découvre la « marihuana » (comme on dit aux États-Unis). C’est alors que certains jeunes patients recevant une chimiothérapie anticancer découvrent que les violentes nausées qui y sont associées disparaissent lorsqu’ils en fument ; ou que, de la même façon, certains soldats stationnés au Vietnam et atteints de glaucome retrouvent une vision normale. Ainsi les propriétés thérapeutiques du cannabis commencent-elles à être redécouvertes fortuitement au cours de son utilisation « récréative ».
C’est en 1996 que la Californie légalise la MM (Medical Marihuana). Une bonne douzaine d’États suivent. Mais le gouvernement fédéral y demeure farouchement opposé, et la police fédérale fait des descentes dans les dispensaires où les patients s’approvisionnent en MM [au fond, logos de différents dispensaires d’Amérique du Nord distribuant du cannabis médical]. En dernier ressort, ce sont les hautes cours de justice qui trancheront. Pendant ce temps, le Canada et les Pays-Bas ont mis en place un programme de culture de cannabis destiné aux malades. Quant aux laboratoires pharmaceutiques, ils préparent toute une série de médicaments brevetés à base de cannabinoïdes synthétiques.
Les vaporisateurs permettent aujourd’hui d’inhaler les principes actifs des plantes en l’absence de fumée (donc sans goudrons toxiques). La matière végétale est chauffée, libérant une « vapeur » riche en principes actifs mais n’atteignant jamais la température de combustion [à gauche, un vaporisateur électrique qui fait passer de l’air chauffé à 200°C sur la substance végétale, dégageant une vapeur refroidie par un passage dans l’eau ; à droite, deux vaporisateurs de poche (fonctionnant tous deux avec un briquet torche), le premier, objet de précision conçu en Suisse, dans sa boîte en forme d’œuf, le second, en verre résistant au feu] •